À 76 ans révolus, Laurent Gbagbo est une icône de la politique ivoirienne. Ses années syndicales, son statut d’opposant historique à Félix Houphouët Boigny, son accession à la Magistrature suprême, la rébellion armée qui a tenté de le renverser depuis septembre 2002, la crise postélectorale, son procès à la CPI, son retour en Côte d’Ivoire, son divorce annoncé avec l’ancienne Première Dame Simone Gbagbo, son rôle à jouer dans la réconciliation nationale, Afrique-sur-7 revient, dans un grand format, sur la vie de l’ancien président ivoirien, dont voici la première partie (1).
Laurent Gbagbo : Parcours académique et intrigues syndicales
Né d’une famille très modeste de l’Ouest ivoirien, rien ne prédisposait Laurent Gbagbo à avoir le destin qu’on lui connaît aujourd’hui. Cependant, le petit garçon de l’école primaire publique Plateau, puis d’Agboville, selon les affections de son père, Koudou Zèpè Paul, finira par se frayer son propre chemin grâce à sa force de caractère et surtout à des concours de circonstances, qui l’ont hissé au sommet du pouvoir.
Bachelier en 1965, Licencié d’Histoire à l’Université d’Abidjan en 1969, c’est bien au Lycée classique de Cocody, où il fut élève, que le natif de Gagnoa deviendra professeur d’Histoire dès le début des années 70. Chercheur à l’Institut d’histoire, d’art et d’archéologie africaine (IHAAA) à partir de 1974, et titulaire d’une Maîtrise d’histoire de Paris-Sorbonne, Gbagbo Koudou Laurent poursuivra ses études jusqu’à soutenir, en juin 1979, une thèse de « docteur d’université ».
Auréolé de son doctorat, c’est à juste titre que l’enseignant de lycée est recruté par l’université d’Abidjan pour y enseigner son savoir. C’est fort logiquement qu’il devient membre du Syndicat national de la recherche et de l’enseignement supérieur (SYNARES). Mais à cause de son activisme syndical, Gbagbo sera emprisonné à Séguéla (nord), puis à Bouaké (centre) de mars 1971 à janvier 1973.
Le professeur militant, alors Directeur de l’IHAAA, récidive au début des années 80 en se révélant lors des manifestations étudiantes ayant entrainé la fermeture des universités et des grandes écoles en 1982.
Laurent Gbagbo : La naissance de l’homme politique et sa farouche opposition à Houphouët-Boigny et Bédié
Parti en exil en France en 1985, Laurent Gbagbo aura toutefois eu le temps de créer, dans la clandestinité, le Front populaire ivoirien (FPI), un parti affilié au Parti socialiste français. C’est bien à la tête de ce parti que Gbagbo entamera une farouche opposition au parti unique, le Parti démocratique de Côte d’Ivoire (PDCI) de Félix Houphouët Boigny, qu’il contraindra.
Mais de retour en Côte d’Ivoire, le 13 septembre 1988, c’est à coup de marches, de meetings et autres frondes contre le pouvoir d’alors, que Gbagbo obtiendra le multipartisme, dès avril 1990. Il se portera candidat à l’élection présidentielle de la même année, à l’issue de laquelle il s’en tirera avec un menu fretin de 18,3%. Mais score d’ailleurs suffisant pour faire de lui l’opposant historique au premier président de la Côte d’Ivoire.
Élu député de Ouragahio lors des législatives de novembre 1990, Laurent Gbagbo donnera du fil à retordre au parti présidentiel avec ses huit autres députés de l’opposition sur les 175 que comptait l’Assemblée nationale en cette période.
La rue sera par ailleurs l’autre arène dans laquelle Gbagbo Laurent s’illustrera également. La marche du 18 février 1992 sera cependant réprimée avec une grande fermeté. Sous la houlette du Premier ministre Alassane Ouattara, Gbagbo est arrêté et écroué à la Maison d’arrêt et de correction d’Abidjan (MACA) en vertu de la loi anti-casseurs.
Houphouët-Boigny décédé, Henri Konan Bédié lui succède par le mécanisme constitutionnel de la vacance de la présidence (décembre 1993), avant d’organiser le scrutin présidentiel d’octobre 1995. Chef de file de l’opposition, Laurent Gbagbo lance le boycott actif de ce scrutin. Bédié remporte, malgré tout, cette élection avec 96,44 % des suffrages face à Francis Wodié.