La marche de l’opposition prévue ce jeudi 22 mars a connu des fortunes diverses selon que l’on est du camp d’Aboudramane Sangaré ou celui de Pascal Affi N’Guessan. Alors que le premier groupe a été dispersé à coup de gaz lacrymogènes, l’autre a pu déposer son mémorandum auprès de la CEI.
Le deux poids deux mesures du pouvoir face à l’opposition
Jeudi 22 mars, Aboudramane Sangaré et Pascal Affi N’Guessan ont appelé leurs militants respectifs à manifester contre la volonté du pouvoir à maintenir la Commission électorale indépendante (CEI) dans sa composition actuelle. La plateforme d’opposition Ensemble pour la démocratie et la souveraineté (EDS) avait en effet appelé ses sympathisants à se rassembler, dès 8h, au niveau de la place des martyrs avant de marcher jusqu’à la place de la République.
Alors que ces derniers se retrouvaient par groupuscule à Adjamé-Liberté pour converger vers le lieu du rendez-vous, que l’impressionnant dispositif militaire mis en place est rentré en action. À coup de gaz lacrymogènes et de grenades assourdissantes, la manifestation de la tendance rigide de l’opposition a été dispersée. Plusieurs opposants, dont Jean Gervais Tcheïde cadre du FPI et directeur de cabinet du président de EDS, ont été arrêtés.
Pour le ministère de l’Intérieur, « l’itinéraire choisi était en plein milieu d’un axe emprunté par près d’un million d’Ivoiriens chaque matin ». Avant d’ajouter : « Lors des trois réunions que nous avons eues avec les organisateurs, à la préfecture, nous avons demandé que l’itinéraire ou la date de la marche soit modifié. Comme il n’y a pas eu d’accord, nous avons émis un arrêté pour l’interdire. »
À l’inverse, Pascal Affi N’Guessan et la coalition de la vingtaine de partis qui l’accompagnait ont pu tenir leur manifestation sans être inquiétés outre mesure. Hormis quelques tensions passagères avec la police, l’ancien candidat à la présidentielle de 2015 a pu conduire sa marche jusqu’à son terme. Il s’agissait pour lui de déposer un mémorandum signé par ladite plateforme regroupant 20 partis politiques.
« Il faut que nous nous engagions tous dans le combat pour une CEI respectant les standards internationaux, une CEI consensuelle, qui ne soit pas l’objet de polémique. Et qu’après cela, nous puissions mettre en place un Sénat inclusif dans lequel pourront siéger les représentants de l’opposition. Avec la démarche solitaire et anticonstitutionnelle empruntée par le chef de l’État, l’opposition en sera totalement absente », s’est-il offusqué.
Le président du FPI a par ailleurs indiqué qu’il ne reconnaitra pas le Sénat, dont l’élection est prévue pour le 24 mars prochain. Car l’opposition n’y sera pas représentée.
Notons que depuis la chute de Laurent Gbagbo, son parti, le Front populaire ivoirien (FPI), s’est cassé en deux tendances. La première, dite des « Gbagbo ou rien », est dirigée par celui que ses partisans appellent « Le gardien du temple » Aboudramane Sangaré et qui a adopté une position rigide vis-à-vis du régime Ouattara. Quant à la seconde, elle est beaucoup plus modérée et dirigée par le député de Bongouanou Affi N’Guessan qui s’est résolument inscrit dans le jeu politique en Côte d’Ivoire.
Le pouvoir d’Alassane Ouattara a visiblement opté pour l’opposant qui lui crée le moins d’ennuis. Ceci pourrait donc expliquer cela. Et la division de l’opposition semble totalement faire l’affaire du pouvoir d’Abidjan.