Deux syndicats de magistrats ont décidé de poursuivre Éric Dupond-Moretti, ministre français de la justice, devant les tribunaux.
Éric Dupond-Moretti desavoué: « Des attaques provenant de notre ministre de tutelle, ça nous déstabilise »
Des magistrats, dénonçant des attaques du garde des sceaux contre l’indépendance de la justice, ont exprimé, jeudi, leur colère contre le ministre français de la justice, Eric Dupond-Moretti. La plainte pour « prise illégale d’intérêts » a été déposée devant la Cour de justice de la République (CJR). C’est le jeudi 17 décembre 2020 que le Syndicat de la magistrature, soutenu par l’Union syndicale de la magistrature, a annoncé avoir déposé plainte contre l’actuel ministre Eric Dupond-Moretti pour dénoncer des conflits d’intérêts.
Sur le parvis du tribunal judiciaire de Paris, dans le quartier des Batignolles, le slogan est chanté en hésitant quelque peu : les magistrats n’ont pas l’habitude de manifester. « Notre premier devoir, l’indépendance ! » Ils étaient une centaine à s’être rassemblés jeudi 24 septembre au pied de leur grande tour, vêtus des habits noirs de juge, pour marquer leur inquiétude vis-à-vis du ministre de la justice, Eric Dupond-Moretti.
« C’est tout un ensemble qui nous fait descendre dans la rue, tonne une magistrate du siège, qui préfère rester anonyme, comme le devoir de réserve l’y oblige. Il y a la demande d’enquête sur des magistrats dénommés, sa prise de parole sur l’Ecole nationale de la magistrature [ENM]… C’est une attaque en règle contre nous. Et provenant de notre ministre de tutelle, ça nous déstabilise. »
Selon plusieurs médias français, les deux syndicats reprochent notamment à l’ancien avocat d’avoir lancé en septembre des poursuites administratives contre trois magistrats du parquet national financier (PNF) qui avaient participé à une enquête préliminaire visant à identifier la taupe qui aurait informé Nicolas Sarkozy et son avocat Thierry Herzog qu’ils étaient sur écoute. Pendant ces investigations, des facturations téléphoniques détaillées de plusieurs avocats, dont celle du futur ministre, avaient été examinées.
Ils reprochent également au ministre d’avoir ouvert une autre enquête administrative à l’encontre du juge Édouard Levrault qui avait affirmé, après la cessation de ses fonctions comme juge d’instruction à Monaco, avoir subi des pressions dans le cadre de ses enquêtes. Avant de devenir ministre, Éric Dupond-Moretti avait été l’avocat d’un des policiers mis en examen par ce magistrat et avait critiqué les méthodes du juge.