Le mardi 9 janvier 2018, des militaires ont attaqué le camp d’une unité d’élite de la police et de la gendarmerie à Bouaké (centre de la Côte d’Ivoire), épicentre des mutineries de soldats ivoiriens en 2017. Cette attaque est une manifestation des soldats du 3e bataillon pour exiger la révocation du Lieutenant Amoudé Traoré, chef du renseignement et de l’investigation au sein du Centre de coordination des décisions opérationnelles (CCDO) de la ville.
Les militaires de Bouaké en disgrâce avec le lieutenant Amoudé Traoré
Des hommes armés provenant du 3e Bataillon de Bouaké ont investi mardi soir la base du CCDO) de Bouaké. Ils ont bombardé à coup de roquettes celui-ci comme le montrent les images de véhicules calcinés à l’intérieur de ce centre et devant ce centre.
Des murs ont été criblés de balles, des mobiliers détruits et d’autres outils de travail saccagés, preuve de la violence de l’attaque essuyée par ce centre. Cependant, aucune perte en vie humaine n’a été signalée. Bien renseignés, les hommes du CCDO avaient déserté les lieux avant l’arrivée des soldats du 3e bataillon sur leur base.
Selon les premières informations, c’est le lieutenant Amoudé Traoré qui est au coeur de la colère des militaires. Les soldats ivoiriens demandaient depuis quelques semaines la révocation du chef de renseignement et de l’investigation de l’unité. Ils ont décidé de mettre à exécution leur menace proférée plusieurs jours auparavant pour montrer la gravité de la situation. Par cette attaque de la base du CCDO de Bouaké, ils avaient à coeur de montrer qu’ils sont bien les maitres de la ville et qu’aucune unité, même bien équipée, ne peut les reléguer au rang de second comme aurait cherché à le démontrer plus d’une fois le lieutenant Amoudé Traoré.
Les militaires reprochent à ce lieutenant du CCDO, ancien cadre des FAFN, son comportement « irrespectueux envers eux » et sa fâcheuse manie à outrepasser de façon systématique les missions qui lui sont assignées. Ils exigent donc le départ de ce lieutenant prompt à marcher sur leurs plates-bandes.
Toutefois, les autorités ivoiriennes jugent cette attitude inappropriée d’autant plus que l’armée, censée assurer la sécurité de la population et des institutions, ne peut aucun cas troubler l’ordre public.
Le Gouvernement Alassane Ouattara a ouvert une enquête pour situer les responsabilités. Des mesures sévères seront prises à l’encontre des auteurs de cet acte violent. «Les enquêtes seront menées et de sanctions seront prises », a indiqué le porte du gouvernement Bruno Koné Nabagné, hier, à l’issue du conseil des ministres au Palais présidentiel d’Abidjan-Plateau.
Mettre à sac des équipements militaires achetés à coup de plusieurs millions de FCFA pour lutter contre le banditisme grandissant dans la région est un fait grave. Le chef de l’État et son équipe attendent bien montrer par les mesures qui pourraient suivre que de tels actes qui prêtent lourdement à conséquence ne peuvent être tolérés.
Dans son discours du Nouvel An, Alassane Ouattara avait affiché son désire de discipliner l’armée ivoirienne. Défié quelques jours seulement après sa sortie par cette querelle entre soldats, il pourrait ordonner de lourdes sanctions contre les soldats ayant mené cette attaque sur le camp du CCDO pour montrer qu’il y a bien au-dessus de tous soldats une hiérarchie.
Pour le gouvernement ivoirien, il est clair que le camp du CCDO ne bougera pas de la ville de Bouaké. La 3e région militaire coupable de cet acte grave à cause de l’ancien bras séculier de la compagnie Guépard, lors de la rébellion de 2002, se met ainsi à dos les autorités. Reste tout de même en suspens la question de l’affectation, ou non, du lieutenant Amoudé Traoré.