La relation diplomatique entre la France et le Mali est au plus mal. La preuve, les dirigeants maliens ont renvoyé l’ambassadeur français dans son pays. Les raisons profondes de cette décision des autorités de la transition.
Renvoi de l’ambassadeur de France, le Mali applique la réciprocité
Le Mali n’a pas accepté la dernière déclaration du ministre français Jean-Yves Le Drian. Le patron de la diplomatie française avait remis en cause la légitimité des autorités maliennes. Par la suite, l’ambassadeur de la France au Mali a été convoqué puis renvoyé dans son pays par Abdoulaye Diop, ministre malien des Affaires étrangères et de la Coopération internationale. Depuis, tous les médias mainstream français ne cessent de relayer cette seule décision des autorités de la transition, oubliant expressément d’évoquer l’expulsion par la France de l’ambassadeur du Mali.
Quand la France renvoyait l’ambassadeur malien
Son excellence M. Toumani Djimé Diallo était ambassadeur du Mali en France jusqu’en février 2020. Ce dernier a tout bonnement été renvoyé dans son pays après son passage devant le Sénat français où il a exposé des faits d’une gravité extrême que n’ont pas acceptés les autorités françaises. En effet, son excellence M. Toumani Djimé Diallo demandait aux sénateurs français d’appuyer sa demande auprès des autorités militaires françaises afin qu’elles prêtent une plus grande attention au comportement de certains soldats français en mission au Mali.
Il dénonçait le fait que certains paradent dans les villes et villages maliens avec des tatouages qui effraient une partie de la population locale. Les légionnaires qui composent en partie la force française au Mali se livrent parfois, selon le diplomate malien, à des actes de vol, agression et autres intimidations des populations. Ces faits lui auraient été régulièrement rapportés par les autorités maliennes suite à des plaintes des populations.
Selon son Excellence Toumani Djimé Diallo, c’est d’ailleurs les agissements de ces soldats qui favorisent l’inimitié des populations maliennes envers l’armée française. Toumani Djimé Diallo avait bien pris soin dans son propos liminaire de préciser que ce comportement inacceptable n’était le fait que de quelques soldats français et non de l’ensemble des forces françaises présentes sur le territoire malien.
Les dégâts d’une arachide pourrie
Il a illustré son propos par un proverbe africain disant qu’ « une arachide pourrie, peut gâcher le goût de toute une bouchée d’arachide ». Un sénateur français, engagé dans la commission des affaires militaires françaises au Sénat, tentera inutilement de recadrer son Excellence M. Toumani Djimé Diallo. Selon ce dernier, l’ambassadeur malien favorise la propagande anti-française en cours au Mali avec son propos.
Loin de se laisser intimider, l’ambassadeur malien lui expliquera qu’il n’avait « aucun complexe » à évoquer la question des armées puisque lors de la guerre mondiale, des soldats maliens et africains avaient également risqué leur vie pour la sauvegarde de la France. Selon lui, si la France vient aujourd’hui militairement à la rescousse du Mali, elle doit le faire dans le respect des lois du pays. La denonciation de Toumani Djimé Diallo avait pour unique but de bénéficier de l’aide des sénateurs pour appuyer ses alertes auprès des autorités françaises afin que cessent les mauvais agissements de soldats français au Mali.
En réponse à cette prise de parole, son excellence M. Toumani Djimé Diallo a été expulsé de France. Dès février 2020, le Mali a tenté à plusieurs reprises d’envoyer un nouvel ambassadeur en France sans succès. Toutes les lettres d’accréditation envoyées par le gouvernement malien au Président français sont restées sans suite. Pendant ce temps, l’ambassadeur de France au Mali était toujours en poste jusqu’à son expulsion du pays la semaine passée.
Quand Marine Le Pen et Éric Zemmour jouent les émotifs contre le Mali
Après l’expulsion du diplomate français par les autorités de la transition au Mali, plusieurs politiciens français ont pris la parole pour dénoncer un manque de respect envers la France. Pour Marine Le Pen, (l’inexistant, ndlr) ambassadeur du Mali en poste en France aurait dû être expulsé dans la minute qui suivait la décision de l’administration Assimi Goïta. Visiblement, la présidente du parti d’extrême droite ignorait que le Mali n’avait plus d’ambassade dans son pays depuis bien longtemps.
Éric Zemmour n’a pas dit autre chose. Le candidat d’être droite à l’élection présidentielle en France, considère l’expulsion de l’ambassadeur français par Bamako comme « une humiliation ». Les médias mainstream français, qui évoquent la décision du Mali, se gardent expressément de relayer cette partie de l’information qui aurait sans doute mieux équilibré les faits.
Quand Gabriel Attal rétablit la vérité malgré lui
C’est le Secrétaire d’État auprès du Premier ministre, Porte-parole du gouvernement, M. Gabriel Attal, qui s’est chargé de montrer la réalité de la situation à Marine Le Pen et aux autres politiciens français qui s’émeuvent d’une supposée absence de réaction réciproque de la France suite à la décision de Bamako.
Il a déclaré « un minimum d’intérêt pour ce dossier aurait permis (aux politiciens français qui demandent le rapatriement de l’ambassadeur du Mali en France, NDLR) de savoir qu’il n’y a plus d’ambassadeur du Mali en France depuis 2 ans. Le Mali a en France un chargé d’affaires de même que nous gardons un chargé d’affaires au Mali depuis le rappel de notre ambassadeur ».
Ce qui est surprenant dans le traitement de l’information du rapatriement de l’ambassadeur français au Mali, c’est que ni RFI, France 24 et TV5 n’évoquent l’expulsion en premier de l’ambassadeur du Mali par les autorités françaises. La France refuse également, depuis deux ans, toutes les propositions d’accréditation d’un nouvel ambassadeur des autorités du Mali.