Contre toute attente, Henri Konan Bédié vient de « tuer » le Conseil national de transition (CNT) mis en place par l’opposition ivoirienne le 2 novembre 2020. Deux mois après sa création, cet organe qui devait se substituer aux institutions ivoiriennes a été dissout par le président du PDCI (Parti démocratique de Côte d’Ivoire) alors que Pascal Affi N’guessan croupit dans un lieu tenu secret. À 86 ans, l’ancien président ivoirien a commis un faux pas politique qui amène à réfléchir.
Il y a un mois, Bédié créait le CNT
Henri Konan Bédié était farouchement opposé à la candidature d’Alassane Ouattara à la présidentielle du samedi 31 octobre 2020. Dans une interview accordée à France 24 en juillet 2020, l’homme politique de 86 ans a déclaré qu’un 3e mandat de son grand rival serait illégal. Déclaré lui-même candidat, le « sphinx de Daoukro » avait du mal à accepter que le président sortant se mette en course pour un autre quinquennat. À propos de la candidature d’Alassane Ouattara, Bédié a conseillé d’ « interroger la Constitution, la loi fondamentale qui régit la Côte d’Ivoire ».
« À son article 55, c’est la limitation des mandats. Il n’y a pas de 3e mandat en Côte d’Ivoire. Or Alassane Ouattara, depuis qu’il a accédé au pouvoir, a fait ses deux mandats. Par conséquent, il n’a pas droit à un 3e mandat. Et ensuite, il prétexte de ce que la Constitution ayant été amendée ou refaite, cela remet les pendules à zéro. Mais tous ces experts qu’il a choisis lui-même lui ont dit que l’article 185 de cette Constitution ne prévoit pas que les compteurs soient remis à zéro par la nouvelle Constitution », a martelé Henri Konan Bédié.
Malgré l’appel à la désobéissance civile lancée par le patron du Parti démocratique de Côte d’Ivoire, Alassane Ouattara est candidat et remporte le scrutin face à Kouadio Konan Bertin dit KKB. Pour sa part, l’opposition ivoirienne, sans attendre la proclamation des résultats par la Commission électorale indépendante (CEI), annonce la création du CNT (Conseil national de transition), présidé par Henri Konan Bédié. La mission de ce nouvel organe est de mettre en place un gouvernement de transition, de préparer l’organisation d’élections crédibles, transparentes et inclusives, mais également de convoquer des assises nationales pour la réconciliation nationale en vue du retour à une paix définitive dans le pays.
Bédié balbutie et dissout le CNT 2 mois après sa création
Le CNT d’Henri Konan Bédié n’a tenu que deux mois. Le Conseil national de transition qui devait écarter Alassane Ouattara du pouvoir afin d’ouvrir une nouvelle ère en Côte d’Ivoire vient d’être dissout par son président. Dans un discours tenu le mercredi 9 décembre 2020, le natif de Daoukro a sonné la mort du CNT. Il a proposé « dès maintenant et urgemment, en accord avec toute l’opposition, l’organisation d’un Dialogue national en lieu et place du « tête-à-tête BEDIE – OUATTARA », car l’enjeu en cause c’est celui de la Côte d’Ivoire Rassemblée ».
Poursuivant, l’ancien allié d’Alassane Ouattara a également fait savoir que « ce nouveau cadre de Dialogue qui verra la participation de toutes les forces vives de la Nation et qui sera encadré, sur le territoire ivoirien par des organisations internationales crédibles spécialisées en la matière, dont l’ONU, remplace évidemment le CNT que l’opposition ivoirienne avait initialement proposé ». Ainsi, le CNT annoncé en grande pompe est en réalité un pétard mouillé. Il faut rappeler que Pascal Affi N’guessan, le porte-parole du Conseil national de transition avait déclaré le 2 novembre 2020 qu’un gouvernement de transition devait voir le jour. Mais les jours se sont écoulés et aucune liste n’a été publiée.
L’opposition ivoirienne, à sa tête Henri Konan Bédié, n’avait sans doute pas mesuré l’ampleur de la nouvelle politique qu’elle entendait mener. Le CNT a été mis sur pied alors que ses membres n’avaient rien planifié. C’est d’ailleurs ce qui a conduit Marcel Amon-Tanoh à prendre ses distances vis-à-vis du CNT. En « tuant » le CNT deux mois après sa naissance, Bédié reconnait subtilement son erreur et tente de rectifier le tir. Le président du PDCI et ses compagnons ont agi dans la précipitation, voulant imposer une transition politique à Alassane Ouattara.