Alors enfant dans une famille modeste au quartier Petit Danané à Danané, la maladie frappe Ounkato Ruffin dit Minto et le laisse très handicapé des pieds. Dans l’incapacité de se tenir sur ses pieds, ce jeune homme de la trentaine, doit ses déplacements à ses paumes de mains et genoux devenus rugueux pour la circonstance. « J’ai connu une enfant pénible. Quand j’ai eu la maladie (poliomyélite) j’avais constamment les mauvais regards des gens sur moi. Jamais, je n’ai eu droit à des faveurs de mon entourage», a-t-il indiqué en nous recevant au seuil de sa boutique très fréquentée par une frange de la population du quartier Petit Danané.
Ounkato Ruffin dit Minto, un exemple de courage pour la jeunesse
Cela ne l’empêche pas de mener des activités génératrices de revenus. Même si son commerce est florissant, l’homme dit continuer avec son premier amour : la cordonnerie. « Le métier de cordonnier m’a beaucoup appris et m’a surtout permis d’avoir une autonomie financière. Car, à la vérité, aucun parent ne m’a aidé. J’ai toujours oeuvré seul. Sans soutien. Cela bien avant la guerre de 2002 en Côte d’Ivoire. Lorsque la crise a éclaté, mes parents ont fui, m’abandonnant à la merci des rebelles dans cette ville de Danané. J’étais confronté à la faim et aux incessants coups de fils. Mais Dieu étant amour, j’ai eu la vie sauve», a-t-il confié avant d’ajouter le manque d’altruisme à son égard :
« A Danané, on aide souvent ceux qui n’en valent pas la peine. Avant la guerre, un groupe de jeunes handicapés ont reçu des moyens importants. Qu’ont-ils fait de ces fonds ? Rien de bon. J’étais là. Sans jamais avoir été associé, j’ai continué avec la coordonnerie. Petit à petit, j’ai fait des économies et ouvert ma petite boutique à partir des friandises. Puis les articles de première nécessité. Ma condition ne m’a jamais freiné dans mon élan. Depuis 2009, je me suis lancé dans des affaires. J’achète des produits alimentaires de Danané que je pars vendre à San-Pedro. Au retour, je reviens avec des articles pour ma boutique», a-t-il dit.
Une débrouillardise qui a fini par payer. Aujourd’hui, celui qui traînait à quatre pattes, s’est acheté une belle monture pour ses déplacements. Une moto pour handicapé qui lui a coûté au total 620.000 FCfa. « Cet engin m’a pris toutes mes économies. Mais je m’en réjouis fortement. Mes déplacements seront désormais aisés», se réjouit-il.
A l’endroit de ses pairs souffrant d’handicap, Ounkato Ruffin leur demande de marcher dans ses pas, se forger du destin en ne comptant que sur leurs propres potentialités. « La vie est certes injuste par moments, mais elle demeure un long passage chez tout être humain. A ce titre, il convient de vivre sa vie pleinement même avec un handicap qui pour moi, n’est pas une souillure. »
Ounkato Ruffin dit avoir de beaux rêves pour son avenir : avoir un grand atelier de cordonnerie équipé et spacieux pour mieux se mettre au service de sa communauté par exemple. A quelques mois des prochaines municipales, le jeune commerçant prie pour la paix et la stabilité dans sa ville. « Que nos acteurs politiques aient pitié de nous autres qui ne pouvons pas courir. C’est dans la paix qu’on aura de quoi nourrir nos familles», a-t-il exhorté.
Une correspondance de Sony WAGONDA